Sur le forum de Parents, une maman s'inquiète des propos de son fils de 4 ans : « Depuis quelque temps, notre enfant parle davantage de la mort. Le soir, avant de se coucher, il nous embrasse et nous dit en écartant les bras : « Maman, je t’aime grand comme ça ! Je n’ai pas envie que tu meures. Si tu pars, je te suivrai dans le ciel. » Des mots qui nous font mal au cœur et nous surprennent sans qu'on sache toujours comment lui parler de la mort. »
Évoquer la mort à partir de 3 ou 4 ans n'a rien d'inquiétant, d'autant plus si notre enfant a déjà éprouvé la mort d'une personne âgée qui lui était proche, ou de quelqu'un de malade, voire de son animal de compagnie. En revanche, l'aspect irréversible de la mort est en moyenne saisi à 9 ou 10 ans. Pour répondre au mieux à ses inquiétudes, mieux vaut ne pas en faire un tabou et s'aider des ressources mises à notre disposition, notamment de livres ou d'albums illustrés.
Comment expliquer ce qu'est la mort à mon enfant de 3, 5 ou 7 ans ?
Les enfants s’interrogent naturellement sur la mort, qu’ils en soient conscients ou non. Les petits sont de grands métaphysiciens ! Le sujet ne leur est pas complètement inconnu : ils en ont déjà entendu parler et peut-être ont-ils déjà joué à faire le mort, « pour de faux ». Mais quand les grandes questions arrivent, plus précises et fréquentes, on peut se sentir démunis en tant que parents, d'autant plus si c'est une source d'angoisse ou de gêne pour nous.
Le mieux est d'éviter d'en faire un tabou et d'accepter d'en parler calmement avec son enfant. Celui-ci aura tendance à imaginer pire que la réalité donc le silence est à proscrire. On lui explique avec les mots adaptés à son âge ce qu'est la mort : on lui parle du cycle de la vie, en illustrant par exemple avec un bourgeon, qui deviendra une petite feuille bien verte, puis plus foncée, avant d'être marron et de se détacher de l'arbre. Mieux vaut éviter de comparer la mort au sommeil, ce qui pourrait faire craindre à votre enfant de mourir en allant dormir, ou d'utiliser des litotes, qui ne permettraient pas à votre tout-petit de bien comprendre ce dont il s'agit. Surtout, les mensonges, même bienveillants, sont vivement déconseillés par les psychologues et professionnels de la petite enfance.
Le décès d'une personne proche ou d'un animal de compagnie peut être l'évènement déclencheur de toutes ces interrogations, relève Olivier Chambon, psychiatre et psychothérapeute : « Votre enfant s’aperçoit à travers la mort de son animal de compagnie ou d’un grand-père ou d'une grand-mère que la vie est éphémère. Il se dit que ça peut arriver aux personnes les plus proches de lui, auxquels il est attaché et qui le protègent depuis toujours. Il s’interroge aussi sur ce qu’il deviendrait si ça lui arrivait ».
Mon enfant a peur de la mort
Selon Jessica Sotto, psychologue spécialisée en thérapies cognitives et comportementales, mieux vaut éviter de dire à son enfant que son grand-père ou sa grand-mère est au ciel, s’est endormi ou est parti : « L’enfant peut attendre son retour, penser qu’il le verra s’il prend l’avion, ou qu’il risque de mourir s’il s’endort lui aussi ».
Si le décès est dû à une grave maladie, on la nomme afin que l’enfant ne pense pas qu’il peut mourir d’un simple rhume. On appuie également le fait que certaines personnes peuvent guérir de cette maladie très grave, mais que ce n'est pas le cas de tout le monde. « On dit aussi à notre petit que, la plupart du temps, on meurt quand on est très vieux, ce qui n’est pas son cas », note la psychologue, qui conseille d'écrire la différence d'âge entre lui et son grand-père ou sa grand-mère afin de le rassurer et lui faire comprendre qu'il a encore beaucoup, beaucoup de temps devant lui avant d'atteindre cet âge.
Comment expliquer la mort d'un bébé ou d'une personne jeune ?
Face à la mort d'un bébé ou d'une personne jeune, le traumatisme peut s'avérer d'autant plus important, à la fois pour nous, adultes, que pour un enfant. Il risque en effet de s'identifier. Il est primordial de prendre le temps de lui expliquer que la vie n'est pas toujours juste, que tout le monde est très triste, et de donner les raisons du décès de cette personne (maladie, accident...) afin qu'il comprenne que ce n'est pas normal de mourir si jeune et qu'il ne doit pas en avoir peur.
On s'appesantit, peu importe l'âge de la personne décédée, sur la tristesse et les sentiments de tout son entourage : cela permettra de légitimer également ceux de votre enfant et de s'autoriser à être triste et à pleurer. Il comprendra également mieux votre humeur et ne se sentira pas coupable de votre affliction.
« On peut proposer à l’enfant de se faire une boîte à souvenirs de la personne disparue avec des photos, des dessins, des choses qu’elle lui a achetées… », propose Jessica Sotto.
L'animal de notre famille est mort : comment réconforter mon enfant ?
La mort d'un animal de compagnie peut être extrêmement difficile à accepter pour un enfant. Là encore, on commence par légitimer ses sentiments, sa tristesse, ses pleurs. Pour la majorité des petits, l'animal de la famille en était un membre à part entière, un ami et un confident. On prend toujours soin d'employer des mots adaptés à son âge, mais toujours justes : on ne cache pas la raison de la mort de l'animal, que ce soit de vieillesse, d'un accident ou par euthanasie.
On peut organiser une petite cérémonie d'adieu en famille, partagez nos meilleurs souvenirs et encourager les enfants à dessiner notre animal. Par ailleurs, il est important de respecter le temps nécessaire au deuil, même pour un animal de compagnie : évitons de se précipiter pour en adopter un autre et attendons plutôt que notre enfant nous le demande.
Répondre à toutes les questions des enfants sur la mort
Avant 10 ou 12 ans, nos enfants peuvent poser au sujet de la mort des questions qui nous semblent inadaptées, farfelues... dans tous les cas, déconcertantes ! Ces interrogations peuvent être d'autant plus délicates à gérer quand elles nous sont posées alors qu'on est en deuil. « Et toi, tu vas bientôt mourir ? », « Qu'est-ce qu'il va manger Papy quand il sera sous terre ? », « On est obligé de mourir ? », « Quand j'aurai ton âge, tu seras morte ? », « Quand est-ce que Mamie aura fini de mourir ? », « On va où quand on meurt ? »...
Le plus important est encore et toujours d'être honnête, d'avouer qu'on ne sait pas, qu'on n'a pas la réponse, que certains pensent qu'il se passe ça, qu'on n'a plus besoin de manger mais que, si ça l'inquiète, on peut glisser une pomme dans sa main... Il n'y a pas de réponse parfaite, du moment qu'on évite le silence, les tabous et l'inquiétude. Et s'il est trop dur pour nous de répondre tout en affrontant nos propres émotions, on n'hésite pas à faire appel à une autre figure adulte pour notre enfant.
Pourquoi on meurt ?
« Pourquoi on meurt ? » est l'une des interrogations les plus fréquentes des enfants. Pour y répondre, on peut s'appuyer sur les généralités : dire que souvent on est très vieux, qu'on a bien profité de sa vie et que le corps et l'esprit sont fatigués. On peut aussi dire que parfois on attrape une maladie ou qu'on a un accident, que c'est moins fréquent mais que ça peut arriver à tout âge, et qu'il faut donc être prudent en traversant la route par exemple.
Quand on meurt, on renaît ?
Il est très important, insiste Jessica Sotto, de dire de façon claire à notre enfant que la personne décédée ne renaîtra pas, ne reviendra pas, mais qu'on peut bien sûr se rappeler les moments partagés, les souvenirs communs, et les commémorer. « On lui explique que le corps ne bouge plus, mais que, même si son corps n’est plus là, on peut continuer à se souvenir de cette personne. On peut ainsi lui proposer de fabriquer une boîte à souvenirs de la personne disparue. Il pourrait y mettre des photos, lui faire des dessins, y garder des choses que la personne lui a achetées… Et dès qu’il ressent son manque et en éprouve le besoin, il ouvre sa boîte, notamment avec nous », détaille la spécialiste. Une réponse claire et adaptée l’aidera à comprendre et à être plus serein.
En tant que parents, doit-on emmener nos enfants à un enterrement ?
Savoir si on emmène notre enfant à une inhumation est une question très délicate, à laquelle on répond en prenant en compte la sensibilité de notre enfant, sa proximité avec la personne décédée, l'organisation de l'enterrement... Une inhumation peut être une très belle cérémonie d'adieu qui permettra à notre enfant d'avancer dans son deuil, de comprendre le caractère définitif de la mort et de voir qu'il a le droit d'être triste, comme tout le monde l'est autour de lui. Mais ce peut aussi être un évènement trop pesant, accablant, choquant pour un petit.
Dans tous les cas, on prépare sa fille ou son fils à cette étape, qu'elle ou il soit là ou pas, on explique en quoi ça consiste, pourquoi c'est important pour nous, et s'il ou elle est assez mature, on peut tout simplement lui demander son avis à l'idée d'y assister.
À lire :
Oser parler de la mort aux enfants, Dr Olivier Chambon, Guy Trédaniel éditeur.
Ce jour-là, Pierre-Emmanuel Lyet, Seuil Jeunesse Éditions.
Capitaine Papy, Benji Davies, éditions Milan.
L’ours et le chat sauvage, Komako Sakaïet Kazumi Yumoto, éditions l’École des Loisirs.
Il faut le dire aux abeilles, Sylvie Neeman et Nicolette Humbert, éditions La Joie de lire.
Au revoir Maman, Rebecca Cobb, Éditions NordSud.
Memento Mori, Conce Codina et Aurore Petit, Éditions du Rouergue.
Où es-tu parti ?, Laurence Afano, Alice Jeunesse Éditions.
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