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Tout savoir sur les dangers du jeu du foulard

enfant main © Istock

Publié le par Antoine Blanchet

En collaboration avec Françoise Cochet (présidente de l'association APEAS)

A l'origine de plusieurs dizaines de décès chaque année, le jeu du foulard continue à se propager dans les cours de récréation. Règles, dangers, prévention... On fait le point sur ce jeu dangereux, et parfois mortel.

 

Avec : Françoise Cochet, présidente de l'association APEAS (Accompagner - Prévenir - Éduquer - Agir - Sauver)

Pour beaucoup, il s'agit d'une légende urbaine, mais le jeu du foulard existe réellement. C'est une pratique répandue chez les jeunes enfants. Ce jeu dangereux peut entraîner des conséquences très graves chez ceux qui le pratiquent, pouvant aller jusqu'à la mort. Afin d'en savoir plus sur ce phénomène, on fait le point avec Françoise Cochet, présidente de l'association APEAS, association qui lutte depuis le début des années 2000 contre les jeux dangereux pratiqués par les enfants.

Définition : quels sont les règles et principes du jeu du foulard ?

« Tout d'abord, il est important de préciser que la terminologie de "jeu du foulard" est trompeuse. En effet, cette pratique ne nécessite pas obligatoirement d'avoir un foulard. Il s'agit de toute pratique voulant provoquer un évanouissement de manière expérimentale et ludique. Au lieu d'un foulard, elle peut se faire avec d'autres objets comme des draps ou de la corde, mais aussi avec les doigts ou avec les bras. Le jeu du foulard peut se pratiquer seul ou à plusieurs », résume Françoise Cochet, présidente de l'association APEAS. Le but de ce jeu aux conséquences tragiques : déclencher des sensations de type hallucinatoire par la perte de connaissance.

Historiquement, ce concept de provocation d'évanouissement n'est pas récent, comme l'explique la présidente d'APEAS : « On retrouve des traces de cette pratique depuis l'Antiquité romaine dans des textes de Plutarque par exemple. Plus récemment, l'écrivain Jean Giono en parle dans un de ses romans en 1947. Longtemps tabou en France, c'est l'alerte médiatique lancée au début des années 2000 par notre association qui va fait prendre conscience de la mesure du problème ».

Rêve indien, jeu de la tomate... C'est quoi ?

Le jeu du foulard comprend toute une liste de différentes variantes, dont l'objectif est le même : provoquer un évanouissement chez celui qui le pratique. Ainsi par exemple, le jeu de la tomate consiste à retenir sa respiration jusqu'à devenir tout rouge. On recense aussi le jeu de la grenouille, où l'enfant s'accroupit et respire en hyperventilation. Récemment, le “Rêve indien” a aussi fait parler de lui via Tiktok. Le principe consiste aussi en un blocage de la respiration. Très présentes aussi, les compétitions d'apnée à la piscine pour déterminer qui respire le plus longtemps, sont aussi dangereuses.

 

Tiktok, vidéos youtube, école... Comment les enfants découvrent le jeu du foulard ?

Si la sonnette d'alarme a été tirée sur les dangers du jeu du foulard et que ce dernier est désormais pris au sérieux au sein des établissements, le phénomène se retrouve encore ponctuellement sur le devant de la scène, lors de drames qui défraient la chronique. En cause : la place grandissante des réseaux sociaux, qui amplifie le bouche-à-oreille des cours de récréation, où se diffuse encore cette pratique. Ainsi, en 2021, une vague de "rêve indien" s'est propagée dans certains établissements, notamment via la plateforme Tiktok, qui diffuse ce genre de pratiques chez les jeunes adolescents. Sur Youtube, on trouve encore des tutoriels et autres démos.

Risques mortels : quels sont les dangers et conséquences de la pratique du jeu du foulard ?

La pratique du jeu du foulard chez soi ou dans les cours de récréation n'est pas à prendre à la légère, car elle comporte bien sûr de nombreux risques. Les dommages causés peuvent être graves et irréversibles, comme l'explique Françoise Cochet : « Le manque d'oxygénation provoqué par la strangulation où l'hyperventilation peut entraîner de graves lésions au niveau des neurones. Un arrêt cardiaque, conséquence de la non-oxygénation, peut aussi se produire, et dans ce cas de figure, l'enfant peut décéder s'il n'est pas pris en charge immédiatement. Ce cas de figure se produit notamment lorsque l'enfant pratique seul dans sa chambre le jeu du foulard. Des séquelles irréversibles peuvent aussi avoir lieu, et produire des déficit moteurs et neurologiques considérables ». Des blessures peuvent aussi être occasionnées lors des chutes causées par l'évanouissement, comme un traumatisme crânien par exemple.

 

Morts par le jeu du foulard : des chiffres encore mal connus

Le nombre de décès liés à la pratique de ces jeux d'asphyxie chez les enfants est encore mal connu en France, comme l'explique Françoise Cochet : « Si chaque année, nous recensons en moyenne une vingtaine de décès, il s'agit de la surface émergée de l'iceberg. En effet, le ministère de l'Intérieur ne comptabilise pas ce type de décès, car lorsque ce type d'évènement ce produit, il n'y a que deux cases à cocher : suicide ou accident domestique. Les seuls chiffres de décès par an que nous avons proviennent de parents nous ayant contactés directement ».

Défi du foulard chez les enfants : quel profil ?

Les risques graves du jeu du foulard sont donc bien réels. Si ce jeu est présent depuis de nombreuses années dans les cours d'école, existe-t-il un profil d'enfants plus touché que les autres par ce phénomène ? Oui et non, explique Françoise Cochet : « Il faut partir du principe que tous les enfants peuvent être touchés par le jeu du foulard. Au sein de notre association, nous avons eu des parents d'enfants décédés qui ne soupçonnaient absolument pas que leur enfant puisse pratiquer ce genre de choses. En revanche, les statistiques que nous établissons montrent qu'il y a un plus grand nombre de garçons qui s'adonnent au jeu du foulard que de filles : parmi les élèves ayant déjà pratiqué ce jeu dangereux, on trouve environ 60% de garçons et 40% de filles. Quant aux enfants décédés, 8 sur 10 sont des garçons. Pour ce qui est de l'âge, le pic se situe en général vers 11/12 ans. Le plus jeune cas de décès recensé a eu lieu à 6 ans, et les plus âgés autour de 20 ans. Il existe aussi des profils psychologiques plus à même de se lancer dans cette pratique. C'est le cas des enfants à haut potentiel intellectuel (HPI), peut-être plus poussés par la curiosité. Mais je le répète, tous les enfants peuvent y être exposés. Certains peuvent être entraînés par d'autres camarades de classe dans cette pratique ».

Jeu du foulard : quels signes doivent m'alerter ?

Le jeu du foulard étant une pratique qui a lieu principalement à l'abri du regard des parents, et des adultes en général, quels signes peuvent mettre la puce à l'oreille ? « Il y a deux types de signes : les signes physiques et les signes environnementaux. Les signes physiques vont être de violents maux de tête, l'apparition de taches rouges au niveau du visage (des vaisseaux sanguins éclatés, appelés pétéchies), des traces rouges et brunes au niveau du cou. Au niveau des yeux, on peut observer une certaine rougeur, et l'enfant peut aussi avoir une baisse soudaine et fulgurante de l'acuité visuelle (dans ce cas de figure, il est impératif de consulter rapidement un ophtalmologiste). De la fatigue et des difficultés de concentration peuvent aussi être constatées. Pour ce qui est des signes environnementaux, il peut s'agir d'une corde ou d'un foulard qui traînent de manière inhabituelle sous l'oreiller ou dans le cartable de l'enfant », détaille Françoise Cochet.

Mon enfant pratique le jeu du foulard : comment réagir ?

Si vous avez des doutes ou des certitudes concernant la pratique du jeu du foulard par votre enfant, comment réagir ? Tout d'abord, il est important de communiquer de la bonne façon, comme l'explique Françoise Cocher : « Il faut être subtil pour évoquer ce sujet avec l'enfant. En effet, il faut faire en sorte que ce soit lui qui vous parle du jeu du foulard. Lui en parler de ce jeu alors qu'il l'ignore pourrait lui donner l'idée de le pratiquer. Toutefois, au moindre doute, vous pouvez lui demander si certains de ses camarades pratiquent des jeux pour s'évanouir. ». Mais le plus souvent, les enfants pratiquant le jeu du foulard refusent d'en parler. Dès lors, comment s'en sortir ? « Si en tant que parent, vous percevez des signes et symptômes concomitants et que vous vous sentez dépassé par la situation, il faut aller voir un médecin généraliste, qui sera le plus à même d'expliquer à l'enfant les dangers que procure le jeu du foulard sur la santé. Il est aussi possible de contacter l'APEAS pour un échange privé avec le parent et l'enfant sur les risques du jeu du foulard ». Dans tous les cas, il faut agir vite. Si vous avez des soupçons, prévenez immédiatement les autres parents d'élèves et l'établissement scolaire, afin que des actions soient mises en place sans tarder

Pour ce qui est de la prévention, n'hésitez pas à vous renseigner sur le site internet de l'APEAS. Les établissements scolaires organisent régulièrement des conférences sur le sujet, en évoquant les signaux d'alerte : « Beaucoup de parents endeuillés nous expliquent qu'à l'époque, ils avaient vu les signes du jeu du foulard, mais n'étaient pas en mesure d'identifier cette pratique », déplore Françoise Cochet. Comme toujours, mieux on est informé, mieux on est armé.

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