De nombreuses maladies peuvent occasionner de la fièvre. Dès lors, il s’agit de savoir si celle-ci peut impacter l’allaitement.
Mastite ou engorgement : il faut savoir si un problème d’allaitement est en cause
Une mère qui a de la fièvre pourrait croire qu’elle traverse un épisode infectieux, qu’elle a la grippe ou le Covid, par exemple. La mauvaise interprétation des symptômes peut retarder la prise en charge de ceux-ci. En effet, « quand une mère allaitante est confrontée à un épisode de fièvre, l’important est de rechercher d’où ça vient », explique Carole Hervé, consultante en lactation IBCLC. « Car engorgement et mastite (inflammation du sein, N.D.L.R.) peuvent en être à l’origine ». Et, « ces affections peuvent nuire au bon déroulement de l’allaitement, et engendrer outre une douleur intense, une possible baisse de lactation voire un sevrage précoce et non souhaité. »
Si une mastite ou un engorgement est constaté, il s’agira de soigner cette affection, ce qui contribuera à faire disparaître la fièvre.
Rappelons que l’engorgement est une surpression dans le sein, due à un drainage incomplet de celui-ci. Le lait n’est pas évacué comme il le devrait, et cette pression occasionne un œdème qui provient également et en grande partie de l’obstruction lymphatique et du liquide interstitiel présent autour des canaux lactifères. En d’autres termes, rappelle Carole Hervé, « le sein n’est pas seulement gorgé de lait comme on l’entend souvent, et on ne risque pas a priori de trop stimuler la lactation si on encourage la jeune mère qui souffre à drainer ses seins de manière adéquate en pareille situation ». La mastite, quant à elle, peut être la complication d’un engorgement, on parle alors de mastite inflammatoire. Mais elle peut aussi être liée à une infection, en raison de la persistance de lésions infectées sur le mamelon, par exemple. On parle alors de mastite infectieuse. Dans ce cas de figure, l’infection devra également être traitée de façon adéquate (une antibiothérapie associée à un drainage efficace et régulier des seins). La règle admise par les instances internationales est que, si les symptômes de mastite sont présents et ne diminuent pas au bout de 24h malgré un drainage optimisé des seins (tétées fréquentes, tirage manuel ou électrique), il convient d’obtenir un traitement antibiotique adapté.
En cas d’engorgement ou de mastite, avec ou sans fièvre, il est recommandé de ne pas arrêter l’allaitement (même si la perspective est de sevrer le nourrisson), et de favoriser le drainage du sein, via la mise au sein du bébé sur le sein touché, dans une position qui permet bien l’écoulement du lait, la louve par exemple, ou, mieux : s’installer confortablement, le dos bien calé et en respectant une légère inclinaison du corps qui permet au bébé de se retrouver lové contre sa maman. Mais aussi via des massages, des compresses d’eau chaude (et/ou une douche chaude, une bassine chaude)… Des antalgiques et des anti-inflammatoires peuvent être prescrits par un professionnel de santé si la situation ne s’améliore pas malgré ces mesures.
Douleur au sein, sein dur : les symptômes à connaître
Mastite et engorgement engendrent des symptômes proches, tels que, par ordre d’évolution et de gravité :
- un sein dur et enflé,
- une zone du sein particulièrement sensible,
- une rougeur localisée (en cas de mastite),
- des douleurs importantes, parfois accompagnées de fièvre,
- un état grippal, avec de la fatigue et des courbatures.
Note : on requalifie l’engorgement en mastite lorsque la fièvre dépasse 38,3 °C.
Frissons et fièvre : la montée de lait peut en être la cause
Au cours de la montée de lait, qui intervient 2 à 5 jours après l’accouchement et voit le colostrum être progressivement remplacé par du lait dit de transition, il arrive que la mère ait de la fièvre, des frissons, si ses seins ne pas drainés de manière optimale. Notez d’ailleurs que ces symptômes ne sont pas un passage obligé. La fièvre est cependant généralement modérée voire légère. Si elle est plus importante, elle peut là aussi être le signe d’une mastite, sur lequel il s’agira d’agir rapidement pour éviter toute complication.
Dans tous les cas, il n’est pas recommandé d’arrêter d’allaiter en cas de fièvre.
Grippe, Covid : des maladies avec fièvre qui n’empêchent pas d’allaiter
« Grippe ou Covid n’ont pas d’effet sur la lactation à proprement parler. On peut tout à fait allaiter alors même qu’on couve un de ces deux virus », nous rassure Carole Hervé. C’est même recommandé, puisque le lait maternel de la maman contaminée va permettre de protéger bébé de l’infection. Or, maman et bébé ayant forcément une proximité physique, et la maman étant généralement contagieuse avant les premiers symptômes, il n’y a guère de moyen de protéger bébé de l’infection autrement qu’en lui donnant de quoi se défendre contre. Un arrêt de l’allaitement n’est donc pas utile ni souhaitable en cas de maladie courante (rhume, grippe, Covid, gastro-entérite ou autre). D’autres raisons peuvent amener une mère à souhaiter sevrer parmi lesquelles une reprise du travail, une organisation quotidienne qui lui semble trop chargée ; mais nul ne devrait la pousser à sevrer contre son gré, qu’elle souffre de fièvre ou qu’elle reprenne une activité professionnelle. À chaque étape de son parcours, si elle est accompagnée d’une manière respectueuse et attentive à son projet, elle peut très bien poursuivre son allaitement.
Le lait maternel, un shoot d’anticorps pour bébé
Poursuivre l’allaitement en cas de maladie courante est d’autant plus recommandé que cela permet d’une part, d’entretenir la lactation et de continuer à nourrir bébé avec du lait maternel, et de protéger son bébé contre la maladie qui affecte sa maman. Car les anticorps produits par le système immunitaire de la mère pour lutter contre l’infection sont présents dans le lait maternel et sont donc transmis au bébé. De quoi lui assurer une protection pendant quelque temps, quelques jours à quelques mois, voire de nombreuses années. Une sorte de vaccination naturelle, en somme. « On sait notamment que le simple fait d’avoir offert du colostrum à son nouveau-né lui procure des bénéfices visibles à long terme sur sa santé cardiovasculaire », indique Carole Hervé.
La fatigue, frein à l’allaitement : une idée reçue ?
« La fatigue n’empêche nullement d’allaiter et ne risque pas de compromettre la production de lait », nous assure Carole Hervé. Généralement, les femmes allaitantes attribuent la baisse de leur lactation à la fatigue alors qu’il existe une autre cause sous-jacente, comme des tétées qui s’espacent, l’absence de tirages suffisants en l’absence du bébé, une succion inefficace du bébé, une pathologie, un médicament incompatible (comme certaines pilules progestatives), un tabagisme important… La fatigue aurait ainsi « bon dos » selon notre experte, et avant de l’incriminer, il est judicieux de s’interroger sur les autres facteurs qui pourraient expliquer cette baisse de lactation.
Quel médicament prendre contre la fièvre quand on allaite ?
On l’a vu, en cas de fièvre durant l’allaitement, il est important de consulter un professionnel compétent si celle-ci persiste au bout de quelques heures, afin d’en déterminer la cause. Dans l’attente d’un rendez-vous médical, il est possible de prendre du paracétamol, à la dose et posologie recommandées (toutes les 6 heures, pas plus de 1 000 mg/prise et selon son poids). Si besoin, c’est le professionnel de santé qui sera consulté pour la fièvre persistante qui donnera ou non des médicaments plus forts ou différents. L’ibuprofène peut ainsi être utilisé pendant l’allaitement mais sur prescription seulement. Rappelons que, de manière générale, et que l’on allaite ou non, l’automédication est déconseillée.